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Les arnaques de la dérégulation des marchés de l'énergie

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La dérégulation des marchés de l'énergie

La dérégulation des marchés de l'énergie, c'est l'ouverture à la concurrence des marchés de l'électricité et du gaz. Les énergies concernées sont un peu particulières dans le sens où leur distribution dépend de réseaux qui ont été mis en place à grand frais par les différents gouvernements au cours du XXème siècle, via les entreprises nationalisées qu'étaient EDF et GDF. L'ouverture des marchés de l'énergie est une initiative du lobby libéral de la Commission Européenne, qui avance les arguments habituels de la libéralisation et des ses bienfaits pour le consommateur final.

La dérégulation ne profite pas à l'utilisateur final

Ouverture des marchés et service public sont 2 notions contraires

La fourniture d'énergie est un service auquel tout à chacun doit avoir accès : ce devrait être un service public. La politique libérale de Bruxelles a instauré l'ouverture des marchés de l'énergie (électricité et gaz, notamment), qui étaient auparavant des monopoles d'état. L'État français s'engage timidement dans cette voie, avec la privatisation progressive d'EDF, la vente (fusion, aha !) de GDF - deux entreprises qui se sont développées grâce à l'argent du contribuable, l'ouverture du marché des professionnels puis des particuliers, tout en maintenant un tarif régulé jusqu'en 2010.

L'ouverture des marchés est un cadeau pour les entreprises, financé par le contribuable.

Les effets de l'ouverture des marchés de l'énergie ne seront pas ceux annoncés par ses partisans

Si la gestion des monopoles d'état (EDF et GDF) a été largement discutable au cours de ces 40 dernières années (notamment avec la construction de centrales nucléaires au frais du contribuable), l'ouverture des marchés ne s'annonce que plus catastrophique. En effet, l'observation de pays européens voisins qui ont dérégulé leurs marchés de l'énergie avant la France montre que :

Résultat des courses : l'usager (devenu client/consommateur) subit de plein fouet une hausse des prix, pas toujours justifiée. En parallèle, de grandes entreprises génèrent d'importants profits. Pas/peu d'investissements à long terme sont programmés (sauf avec quelques industries très énergivores ou pour des raisons commerciales - image vis-à-vis du développement durable, notamment). Les investissements les plus lourds sont subventionnés.

L'accès à l'énergie, à l'origine un service public, est devenu un bien de consommation, au même titre que n'importe quel produit manufacturé. C'est une gigantesque arnaque dans laquelle l'usager, devenu client, est lésé. C'est d'autant plus vrai que le client est petit (le particulier, par exemple).

Finalement, quel intérêt pour l'usager le client

Aujourd'hui, face à un marché de l'énergie compliqué à appréhender en raison de la multiplicité et de la complexité des offres disponibles chez les différents fournisseurs, comparer les prix est chose difficile, voire impossible pour le particulier. Sans parler des problèmes de mise en œuvre et l'impossibilité des opérateurs de garantir le prix de l'énergie sur le moyen terme…

Finalement, le seul point intéreressant sur l'ouverture des marchés de l'énergie est la possibilité de choisir un opérateur alternatif, qui défende des valeurs écologiques, tel qu'Enercoop pour la fourniture d'électricité verte.

La précarité énergétique

Choisir un fournisseur d'énergie militant comme Enercoop représente un surcoût à l'usage. En pratique, tout le monde ne peut pas se permettre de supporter une telle dépense.

Le terme de précarité énergétique est apparu récemment. Il désigne la difficulté pour les faibles revenus à s'acquitter de leurs factures d'énergie (électricité, fioul, gaz…), en parallèle aux difficultés rencontrées avec l'augmentation générale du coût de la vie.
De part leur faible capacité d'investissement, les faibles revenus ne sont pas capables de mener des actions de maîtrise de l'énergie efficace. C'est la classe sociale qui subit de plein fouet l'augmentation des prix de l'énergie.

Dans une situation d'ouverture des marchés de l'énergie, dont nous avons évoqué les conséquences plus haut, les faibles revenus seront toujours plus exposés à la précarité énergétique. Il sera alors nécessaire de mettre en place des mécanismes de soutien, telle l'instauration de tarifs « sociaux » pour l'énergie, à défaut de financer des mesures de maîtrise de l'énergie. Le cas échéant, les classes moyennes seront vraisemblablement les plus affectées par leur contribution au financement de tels mécanismes. L'accès à l'énergie deviendra alors un luxe, alors que ce devrait être un droit fondamental.

L'ouverture des marchés de l'énergie est une erreur monumentale, une véritable arnaque pour le petit consommateur. Qui a osé parler de progrès ?

Les autorités sont théoriquement conscientes du problème, mais semblent assez lentes à réagir… Plusieurs types d'acteurs, principalement dans les milieux associatifs, se mobilisent pour faire face au problème. Dès 2007, un atelier réalisé dans le cadre du programme européen EPEE a produit ce rapport, qui met bien en évidence les différents problèmes des foyers à bas revenus face à l'ouverture des marchés de l'énergie. La liste est très fournie, et certains points dépassent le seul cadre de la précarité énergétique, puisque n'importe quel foyer peut être concerné. Par exemple, le document recense ces différents points, que j'aborde aussi dans cette page :

Bref, ce document recense de manière assez exhaustive les effets pervers de l'ouverture des marchés sur les populations défavorisées, et montre en filigrane que l'ouverture des marchés est le résultat d'une politique qui vise uniquement à desservir des intérêts économiques au détriment d'un progrès social et environnemental.

Des pratiques commerciales plus que discutables

Commerciaux malhonnêtes et abus de confiance

L'ouverture des marchés de l'énergie a logiquement fait aparaître de nouveaux opérateurs, dont certains ne sont même pas producteurs d'énergie (Direct Énergie est par exemple comparable à un détaillant qui se fournit sur le marché de gros). L'arrivée de ces nouveaux opérateurs va de paire avec l'arrivée de commerciaux qui partent en chasse (le pigeon est vraisemblablement le gibier privilégié). On a ainsi vu débouler des armées de VRP multicartes qui s'essaient à l'énergie, après avoir vendu de l'internet, de la téléphonie, j'en passe et des meilleurs.

La conséquence directe est l'émergence d'arnaques mises en place par certains de ces commerciaux peu scrupuleux. Direct Énergie est par exemple réputée (mais ce n'est pas la seule) pour avoir vu son portefeuille de clientèle artificiellement gonflé par des personnes qui ont été abusées par ces commerciaux :

Comme souvent, les cibles privilégiées sont les plus influençables : personnes âgées, populations défavorisées, etc. Ce phénomène n'est pas propre à l'ouverture des marchés de l'énergie, mais à tout marché de service qui représente une nouvelle opportunité pour les VRP multicartes.

Gaz de France : un spécialiste du racket

Avec la récente ouverture à la concurrence des marchés du gaz et de l'électricité pour les particuliers, Gaz de France joue (plus ou moins malgré lui) sur 2 tableaux : le marché dérégulé (en « libre » concurrence), et le marché régulé, puisque l'État a décidé de conserver un tarif régulé jusqu'en 2010. Problème : avec le tarif régulé, GDF ne peut pas répercuter rapidement la hausse du prix du gaz (indexé sur celui du pétrole), avec pour conséquence un manque à gagner évident, voire des pertes sèches.
Sous couvert de problèmes informatiques liés à l'externalisation d'une partie des services de facturation et un changement de logiciel, GDF s'amuse à surfacturer largement les consommateurs particuliers. Si je ne peux pas affirmer que cette démarche est généralisée, en revanche il semble qu'elle est relativement répandue.

Depuis 2007, GDF a décidé de supprimer les « relevés confiance » (l'abonné relève lui-même son compteur afin que l'évaluation de sa consommation soit la plus précise possible) : ce service permettait de facturer l'abonner le plus justement possible par rapport à sa consommation réelle.
Cette suppression s'est accompagnée dans certains cas par de larges surévaluations de consommation de gaz (parfois jusqu'à 80%, comme dans mon cas personnel). Le surplus payé par l'abonné est évidemment régularisé lors des relevés réalisés par GDF, néanmoins, avec 2 relevés par an GDF peut placer l'argent pendant plusieurs mois et récupérer ainsi des intérêts. Contrairement à l'abonné, lui, qui s'est vu soulagé de plusieurs centaines d'euros pendant plusieurs mois.

Bien évidemment, GDF refuse toute contestation et renvoie éventuellement vers son médiateur pour tenter de régler le litige.

GDF rackette ses abonnés. Même si on peut lui trouver l'excuse de l'impossibilité de répercuter intégralement et en temps réel l'évolution du prix du gaz, il semble tout à fait injuste que le petit consommateur en fasse les frais. Peu concurrencé sur le marché du particulier (plutôt réticent à quitter le tarif régulé), GDF profite de sa position dominante pour « emprunter » de l'argent aux revenus les plus modestes…

Mise à jour janvier 2009 : malgré qu'un ajustement ait été réalisé après notre dernière facture surestimée, GDF réitère et surévalue notre consommation de 300% sur les 2 derniers mois. Même si on peut tolérer une petite surestimation due à la récente vague de froid, un écart de 300% est tout sauf acceptable. Dès lors, on peut considérer que :

Peut-être même qu'il s'agit d'un peu de tout ça à la fois… La fusion avec Suez et la recherche de profits permanents pour alimenter les dividendes des actionnaires aurait-elle quelque chose à voir avec tout ça ??

Mise à jour mars 2009 : GDF-Suez remet ça !! Un petit bilan de consommation annuelle de gaz nous montre que GDF-Suez se moque bien de ses client : GDF-Suez a estimé ma consommation de gaz annuelle à 13.8 MWh, alors que celle-ci s'élève en réalité à 7.8 MWh pour la même période. Résultat : une consommation surestimée de 77% !! Si GDF-Suez procède de la même manière avec de nombreux clients, pas étonnant que le groupe puisse annoncer un résultat net de 6.5 milliards d'euros pour 2008 !

EDF cherche à maintenir la confusion pour asseoir sa suprématie d'opérateur historique

Aujourd'hui, avec l'ouverture des marchés du gaz et de l'électricité pour l'ensemble des usagers (particuliers compris), EDF joue sur plusieurs plans pour défendre ses intérêts et sa position d'opérateur dominant. Les particuliers qui avaient une seule facture pour le gaz et l'électricité il y a quelques années se retrouvent avec une facture EDF pour l'électricité et une facture GDF pour le gaz, sans vraiment se rendre compte de la différence (sauf dans le cas du paragraphe précédent…).

Dans ce contexte, EDF est le seul opérateur électrique à pouvoir continuer à proposer un tarif régulé, dont l'augmentation doit être préalablement acceptée par le gouvernement. En réalité, je ne sais pas s'il s'agit d'un avantage ou d'un inconvénient (du point de vue financier pour l'opérateur), mais je suis certain que c'est contraire à l'ouverture à la concurrence prônée par Bruxelles. Bilan : les concurrents font des pieds et des mains pour tenter de proposer de l'électricité à des prix compétitifs, tout en essayant de rassurer le consommateur sur la pérennité de ces tarifs. EDF, lui, continue à décourager les consommateurs à changer de founisseurs, attitude confortée par la position des associations de défense des consommateurs et par une législation qui fait 1 pas en avant et 2 pas en arrière : maintien du tarif régulé (d'ailleurs en discussion pour le prolonger au-delà de 2010 (« dans l'intérêt des consommateurs dans ce contexte de hausse des prix de l'énergie »), refus d'augmenter le tarif régulé pour refléter l'augmentation des prix sur le marché, etc.

EDF joue sur 2 plans : décourager la clientèle historique de changer de fournisseur (au point de lui laisser entendre qu'il ne peut pas en changer), et dans le même temps essayer de lui vendre du gaz (à la place de GDF…).

EDF est désormais un « simple » fournisseur d'électricité, qui utilise l'infrastructure du réseau français gérée par RTE. Autrefois sous le giron d'EDF, RTE est désormais une entité à part entière qui doit traiter avec EDF de la même façon qu'avec n'importe quel autre opérateur. Pourtant, une de mes connaissance a récemment reçu une lettre d'EDF l'informant de prochaines coupures d'électricité : après contact avec RTE, les choses ne sont pas apparues plus claires. EDF cherche à entretenir la confusion auprès du consommateur, en laissant entendre que c'est toujours lui qui est le seul et unique acteur du marché de l'électricité français. Si les chiffres montrent que c'est encore relativement le cas, et en dépit du fait que l'accès à l'énergie devrait davantage être un service public qu'un marché privé, l'ouverture des marchés offre au moins la possibilité de choisir un fournisseur en accord avec ses valeurs, qui n'agit pas que dans son propre intérêt : j'ai nommé Enercoop, coopérative de production d'électricité verte. Ceux qui peuvent se permettre de payer un peu plus cher le kWh d'électricité verte n'ont pas d'excuse : ils peuvent désormais devenir acteurs du changement, sans trop changer leurs habitudes, mais en délaissant les producteurs privés qui n'ont d'autres objectifs que les profits et la maîtrise du secteur à travers une clientèle captive. Quittez EDF avant qu'il ne soit trop tard !!

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